En
Espagne, sur leurs blogs, des acteurs de terrain des collectivités
territoriales discutent autour d'idées, de suggestions et de conseils
formalisés pour une démarche participative citoyenne en ligne des internautes.
Ces articles qui se répondent les uns les autres, se complètent montrent des
champs des possibles et traduisent avec des mots des recommandations pour une
expression des citoyens sur Internet sur leurs préoccupations locales et dans
un mode d'interaction avec les collectivités locales.
Dans cette perspective, le blog collectif Administraciones en Redes vient de
publier un article dont la lecture est passionnante : "Conductas politicas para para la participación ciudadana"
("Conduites politiques pour la participation des citoyens"). En voici une
traduction personnelle condensée. Ces points de travail sont également précieux
dans la conduite/gestions de projets collaboratifs en ligne ; un manifeste de
la participation collaborative sur Internet :
"(version Wiki pour politiciens 2.0)
A toi, professionnel de la politique, représentant de la volonté populaire ou
gestionnaire de services publics, qui croit que la démocratie est plus que de
voter année après année, qui rêve d'un système dans lequel la politique est un
peu plus qu'une dispute habituelle entre des partis, qui souhaite être
utile à ta société et qui désire que cette société accorde une légitimité
au travail des politiciens, aspirant-politicien 2.0, j'offre ce catalogue
de conduites pour la participation des citoyens.Et, à toi, lecteur -mon
semblable, mon frère !- je t'invite à corriger, à compléter cette lettre très
particulière aux Rois Mages :
1. Participation signifie partager le pouvoir. Donner une information
n'est pas la même chose que d'offrir la possibilité de participer.
Rassembler des informations n'est pas permettre une participation. La
participation signifie aussi la prise de décisions. Il s'établira une société
civile forte quand on ouvrira les processus de décisions à la participation des
citoyens.
2. Écoute, écoute, écoute. Il est probable qu'il existe déjà une
conversation sur le sujet qui te préoccupe. Si la conversation existe déjà, on
peut consulter ce qui est dit et repérer qui sont les protagonistes dans ce
réseau de dialogue. Internet est un locuteur très important doté d'outils
pour l'écoute : Technorati,
BlogSearch,
Del.ici.ous...
3. Si la conversation existe déjà quelque part, il est plus adéquat de
ne pas l'initier (elle existe déjà, tu te rappelles ?), de la
monopoliser (pour que réduire sa diversité ?), ni de se l'accaparer (tu ne
pourras pas). Il suffit d'y participer. Avec le temps, peut-être deviendras-tu
un noeud significatif du réseau conversationnel.
4. Quand la conversation n'existe pas, il faut se poser
la question si cela vaut la peine de l'entamer. Si le
sujet n'a pas été présent jusqu'à maintenant dans les conversations,
peut-être que cela n'intéresse pas les citoyens. Comment les intéresser
? Les gens prennent part à des conversations qui s'avèrent proches d'eux,
habituelles, faciles, naturelles et qui offrent quelque chose de tangible à
améliorer dans leur vie.
5. Lie, relie, relie. Participe aux conversations
des autres mais ne sois pas le leader de toutes les
conversations. Il faut s'adapter aux conversations en se faisant petit, en
escaladant pas à pas la connaissancedu sujet et il faut aussi avoir de la
mémoire. Il n'y a pas de meilleure façon d'obtenir que quelqu'un
s'intéresse à une thématique que de le proposer en
démontrant que tu t'intéresses aussi à ce que proposent les autres.
6. Ouvre-toi au monde. Pense que dans une conversation, une
institution n'est pas un interlocuteur. La conversation est une affaire de
personnes. Tu devras prendre des risques. Il faudra prononcer des affirmations
comme provisoires et les rectifier. Sois transparent. Il faut
aussi réfléchir.
7. L'attitude fait tout dans une relation entre des personnes.
Il ne faut pas tout gaspiller avec une attitude qui n'est pas compréhensible.
Il faut avoir de l'humour, être persévérant, élégant, tolérant, agir avec
constance. Sois un simple citoyen qui participe à une conversation, mon
ami.
8. Ne te préoccupe pas trop du nombre de personnes qui prennent part à
la conversation mais surtout à la quantité de bonnes conversations qui
s'établissent. Prendre part à une conversation est un acte volontaire. Ne pas
s'intéresser à comment empêcher qu'une personne fasse un mauvais
usage du pouvoir ; prendre plutôt le soin de comment pouvoir faire
pour que beaucoup de personnes fassent un bon usage du pouvoir. Les
menaces sont toujours plus évidentes que les avantages parce que le changement
fait peur.
9. Tu dois savoir qu'il n'y a pas d'obéissance aveugle, ni même
borgne. Les participants aiment se différencier les uns des autres. Si
le projet collectif n'implique pas que mon avis soit considéré, je ne peux pas
croire au projet.
10. Les citoyens adultes méritent d'être traités comme tels.
Ne sois pas paternel, ni maternel avec eux. Laisse-leur la liberté et la
responsabilité. Ils prendront en charge ce qui les concernent. Ils peuvent se
tromper. La participation implique le respect des participants.
11. Les destinataires des politiques publiques peuvent améliorer leur
conception et leur implantation locale et,
évidemment, trouver que les décisions suite aux
discussions soient plus conformes à leurs désirs. Toutefois, n'espère
pas à court terme que les résultats soient extraordinaires. Le principal est
l'ampleur prise par la participation. Évaluer la participation peut la tuer
avant que celle-ci grandisse réellement. Le premier objectif est
de construire une Communauté active, avancer pas à pas vers une
citoyenneté véritablement civique.
12. Enfin, il faut avoir en tête ces trois principes
: (1) La mauvaise participation est contre-indiquée, parce qu'elle
sème la méfiance et le découragement. (2) L'absence de participation est
encore pire que la mauvaise participation. (3) Il est dangereux de faire passer
comme participation la simple manipulation."